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Le QI a fait son temps – place à une nouvelle forme d’intelligence

Par le passé, le QI était la seule mesure de l’intelligence qui comptait. Vous pouvez faire deux tests de QI à 25 ans d’intervalle et votre résultat ne changera pas, car le QI mesure la capacité intellectuelle avec laquelle vous êtes né(e). 

Dans un univers rationnel et cartésien où les créatures et les objets sont catégorisables, un indicateur aussi constant avait du sens. Il était aussi rassurant de par sa nature quantitative, qui semblait plus « scientifique ».

Mais les êtres humains sont trop multiples et compliqués pour être réduits à une seule série de tests. Au cours des dernières années, nous avons été témoins de l’ascension du QE, soit du « quotient émotionnel », une mesure qualitative – car comment pourrait-on compter l’intelligence émotionnelle? Son apparition dans la culture s’explique par l’émergence d’une vision plus holistique de ce qui fait de nous des êtres humains. Elle reconnaît l’existence de l’empathie, la capacité à se mettre à la place de l’autre, et cette idée a pavé la voie à une toute nouvelle manière de considérer l’expérience des consommateur(-trice)s. Elle exigeait que nous apprenions à mieux écouter, tout en admettant que certain(e)s d’entre nous soient naturellement sensibles aux émotions d’autrui, alors que les autres doivent y travailler. 

Le QA, ou « quotient d’adaptabilité », s’intéresse justement à notre potentiel, à notre ouverture au changement, à l’intérêt que nous portons à la nouveauté et à la diversité qu’offrent notre monde chaotique, paradoxal et complexe, et à notre capacité à faire notre chemin dans tout ça. 

Savoir s’adapter est d’une importance cruciale dans un environnement média dynamique où doivent converger les canaux émergents et traditionnels. Nombre de marques surgissent sans pour autant réussir à établir un lien avec leur public. Leur utilisation des canaux de diffusion était peut-être excellente, mais la visibilité ne suffit pas. De nos jours, en particulier sur les médias sociaux, une marque doit pouvoir montrer qu’elle évolue au rythme de la culture. Elle ne peut plus se contenter de miser sur la portée et la fréquence, en martelant inlassablement le même message à la radio et à la télé. Le marketing est devenu beaucoup plus nuancé que ça. 

Par ailleurs, nous n’avons d’autre choix que de nous adapter, car nous travaillons avec de plus en plus de gens. Il y a dix ans, une même personne aurait été responsable de la conception et de l’exécution de la stratégie de marque. Maintenant, les équipes sont composées d’un vaste éventail de spécialistes. Il faut donc savoir accueillir les idées des autres, ce qui revient à l’idée d’adaptation.  

Aujourd’hui, on travaille aussi avec des données. Beaucoup de données. Notre obsession grandissante des données génère des kilomètres de feuilles de calcul. Et pourtant, ce dont nous avons besoin encore plus que des données, c’est savoir quoi en faire. Comment les utiliser pour créer cette fameuse connexion, bâtir ce pont proverbial que permet l’empathie? Tout le monde se procure les mêmes ensembles de données; tenter d’en dégager un facteur de différenciation ne rime à rien. C’est plutôt de notre compréhension qualitative de l’information que naît la magie. 

Aux côtés de l’adaptabilité et des données, la question du sens est aussi devenue une priorité pour les marques. Cette quête répond aux multiples crises existentielles dont la jeunesse a hérité des boomers et qui ont par ailleurs engendré le rejet le plus total des valeurs parentales par la nouvelle génération depuis les années 1960. Pour s’adresser aux millénariaux et à la génération Z, les marques n’ont plus eu qu’à leur parler de sens.  

Le vrai défi, du point de vue de l’entreprise, consiste à trouver le moyen de concilier son engagement environnemental et social avec ses objectifs commerciaux. Si la raison d’être d’une entreprise joue un rôle fondamental à long terme, son identité de marque ne peut pas en dépendre entièrement si elle veut atteindre ses cibles financières à court terme. Il faut trouver le bon équilibre.  

Une marque qui souhaite prendre position par rapport à une question d’importance dans le monde doit le faire en concordance avec son positionnement, de sorte que son geste fasse ressortir les tensions culturelles qui alimentent son identité et son auditoire. Ainsi, elle demeurera pertinente, authentique et fidèle à ses valeurs. C’est comme ça qu’on bâtit des marques aussi multidimensionnelles que les êtres humains, c’est une autre manière de témoigner de l’empathie.  

Ce ne sont pas là que des contraintes externes; ce sont aussi des exigences internes. La pandémie a jeté une lumière crue sur la santé mentale et mis en évidence certaines choses qui avaient déjà cours autour de nous. Elle nous a incité(e)s à faire preuve de compassion, non seulement envers les consommateur(-trice)s, mais envers les collègues également, et à favoriser la collaboration. Finie l’époque où les stratèges se rassemblaient dans une pièce sombre, étaient touché(e)s par la grâce et rédigaient le brief parfait avant de le refiler aux créatif(-ve)s qui, à leur tour, se retiraient dans leur coin pour pratiquer leur magie. Nous devons travailler ensemble, dans la même pièce. Chaque personne contribue à une perspective et une expertise différentes, chaque personne a un rôle à jouer. En restant respectueux(-ses) et en acceptant l’inévitable part de frictions qui vient avec ça, on peut aller beaucoup plus loin qu’on en aurait été capable autrement.   

Mais pour y arriver, ça prend plus que le QE. Ça prend le QA.

Ce qu’il faut retenir

Il y a un nouveau « Q » en ville.

Vous avez déjà entendu parler du QI. Et du QE. Mais avez-vous entendu parler du QA? Il s’agit du « quotient d’adaptabilité », c’est-à-dire l’aptitude à rester ouvert(e) au changement et à s’adapter au chaos, à la contradiction et à la complexité de notre monde actuel, un atout dont bénéficieront autant les clients que les agences de création.

Peut-on encore s’amuser en publicité?

Tandis que le marketing est de plus en plus axé sur les données et que son obsession grandissante de l’empirisme génère des kilomètres de feuilles de calcul, nous sommes peut-être en train de perdre de vue l’essentiel. Ce dont nous avons besoin encore plus que de données, c’est de savoir quoi en faire.

Le sens, c’est stratégique, pas tactique.

On insiste énormément sur l’importance du sens de notre travail, ces jours-ci, et bon nombre de prix sont décernés à des créations qui tendent vers un but plus grand qu’elles-mêmes. Si cette orientation contribue certainement à soutenir le développement d’une marque à long terme, elle n’aura pas forcément d’incidence sur les résultats du trimestre en cours. Comment concilier les besoins de la marque et les objectifs commerciaux à court terme de nos clients?

Devenir plus à l’aise avec l’inconfort.

La croissance et le changement sont douloureux. Le QE et le QA sont difficiles à développer, mais nécessaires lorsqu’on travaille avec des gens. Ils déterminent comment on agit avec les autres, quelles relations on choisit de nourrir et de quelle manière, et comment on fait face à la complexité et à la contradiction.